J 13 - Mercredi 5/4 Les Wuyishan (suite)

Nihao à tous.
Ce matin était consacré à la descente de la Rivière aux 9 Méandres, en rafting, en radeau de bambou.

Cela se passe donc dans des radeaux plats faits de troncs de bambou légèrement incurvés vers l'avant. On y installe 6 fauteuils bas en bambou et le radeau est piloté par 2 gaffeurs, l'un à l'avant, l'autre à l'arrière, qui manient 2 grandes perches en bambou terminées d'une pique métallique

Assez stable, on nous revêt quand même de très seyants gilets de sauvetage orange qui nous transforment illico en bibendums.
Je suis en compagnie d'une famille chinoise : le grand père et la grand-mère, le père et la mère et la petite fille et son épuisette.
Par chance, les congés chinois sont terminés et nous sommes peu nombreux à faire la descente de la rivière.

Le voyage durera 1h45, la rivière changeant 9 fois de parcours, assez abruptement. A chaque rapide, l'eau submerge le plancher du radeau, ce qui fait qu'au 1er virage j'ai les pieds trempés. Les chinois, eux, savaient qu'il fallait se munir de protèges chaussures en plastique. Je mets donc mes pieds sur le dossier du fauteuil devant moi.

Un voyage magnifique, dans le calme et la sérénité, les chants d'oiseaux inconnus. On côtoie des chutes d'eau, des grottes, des rochers de grès rouges, des sommets de formes inhabituelles. L'eau est limpide, on y voit plein de poissons à qui la petite fille jette des bouts de pain qu'ils attrapent en sautant. Même les oiseaux volent depuis les rives pour pêcher les miettes, nullement apeurés.

La végétation est magnifique en cette saison, des bambous queue de phénix dont les cimes se penchent si gracieusement vers le sol, des pins, des canneliers et toujours les rhododendrons et les azalées en fleurs.

On passe devant quelques temples et devant certaines montagnes qui portent, dans leurs enfractuosites, des cercueils de civilisations anciennes, perchés, là haut. Ces cercueils suspendus dont l’histoire remonte à plus de 3000 ans symbolisent l'ancienne culture du Fujian. Ce sont les plus anciens de ce type en Chine. En revanche, la raison pour laquelle ils se tiennent accrochés à la falaise reste, toujours un mystère. 

Et puis, ça et là, de minuscules rangées de théiers, qui donneront ce thé unique, extrêmement rare et l'un des plus chers du monde.

Après cette descente, je ferai une grande balade à pied dans le Parc des Wuyishan, au WuyiGong et ses belles statues moussues, comme tous les troncs d'arbres de cette montagne très humide..

Pour revenir au village de Xingcun, on m'enverra, comme d'habitude, vers des arrêts de bus dont les conducteurs me renverront vers un autre endroit jusqu'à ce que je trouve le bon.
Ils sont vraiment terribles, les chinois, à vous indiquer n'importe quel chemin, plutôt que de risquer de "perdre la face" (ce qui est l'offense suprême) en avouant qu'ils ne savent pas.

Sur le chemin du retour, je grignote des galettes aux oignons et aux herbes que je fais confectionner dans la rue. Le couple se partage le travail : la femme prépare la pâte, qu'elle roule d'abord en un boudin, qu'elle débite ensuite en boules. Le mari prépare la farce, qu'il place au milieu de la boule et façonne ensuite une galette qui est collée sur la face intérieure d'un four (dans un bidon ...) et on glisse au centre une grosse chaufferette. Je retraverse le marché et je m'achète des sachets de graines d'herbes pour planter sur mon balcon (des cébettes chinoises et de l'amaranthe rouge).

J'admire et je photographie des étalages d'outils, de vanneries pour le travail du thé et la récolte, des claies en bambou pour le tri. Tout une vie de village rural.

Nouvelle dégustation de thé avec Baozhen et je pars me balader à pied dans les champs de théiers autour du village, seule car j'ai insisté pour que Baozhen ne m'accompagne pas. Il y en a partout, depuis le bord de la route et les talus, jusqu'en haut de toutes les collines, en terrain plat ou sur les coteaux.

C'est peu dire qu'il faut faire très attention aux qualités. Mais comment faire quand on achète en France, à des vendeurs qui vous disent tous qu'ils se fournissent chez un certain monsieur Chang, ou Dong, ou Ma, ou je ne sais qui, et qu'il a le meilleur thé de la région ?

Je constate aussi que les théiers ont pratiquement tous de grandes feuilles vert foncé, très peu présentent de petits bourgeons verts tendres. J'apprendrai que ce n'est pas le même cultivar et qu'il est destiné au thé vert, ce qui n'est pas la spécialité de cette région.

Sur le chemin du retour, j'avise, dans la cour d'une maison, des personnes en train d'étaler leur récolte de jolis bourgeons de thé vert sur des claies de bambou. J'entre et leur demande à assister au travail. Il faut qu'ils fassent vite. Le thé est très fragile.
La patronne me rejoint et me propose de visiter l'atelier et de faire une dégustation.

Elle me prépare un thé vert Lu Mu Dan (Pivoine verte), dont je n'avais jamais entendu parler. De catégorie C, récolté en 2016.
Dans les thés de qualité, on classifie les catégories de récolte en 3 grades : Grade A, ou récolte impériale est constitué uniquement du bourgeon, Grade B est constitué du bourgeon et de la minuscule 1ère feuille, Grade C est constitué du bourgeon et des 2 minuscules 1ères feuilles. (Et dans les sachets de thé Lipton, le grade Z est composé de tout un ramassis de miettes de tiges, voire de poussière !!!! BEURK).

Il est excellent et j'en achèterai un peu, qu'elle me préparera et me mettra en boîte sous vide. Ici, le thé se vend par 50g et coûte assez cher.

Mais c'est le thé qu'ils sont en train de préparer à l'atelier à côté qui m'intéresse. Elle me dit de repasser demain après-midi, il sera terminé et je pourrai le voir et le déguster.

Le reste de la soirée, je redégusterai d'autres thés avec Baozhen. Lui est amateur de thés rouges, plus corsés que le thé vert et, têtu, il ne veut pas croire que j'ai trouvé du thé vert, il prétend que c'est trop tôt, qu'il faut attendre encore 15 jours. Il me fait un peu douter.
On est assez cocasses tous les deux, lui parle chinois très vite, avec un assez fort accent. Par exemple il ne sait pas dire le son CH, et il y en a beaucoup en mandarin. Ce qui occasionne des incompréhensions de ma part. Bon, on s'aide de nos traducteurs sur nos téléphones. Il ne parle pas l'anglais.
Je lui achète du thé Da Hong Pao et du Lapsang Souchong de sa production en petits sacs individuels sous vide.
J'irai à la poste demain pour me les envoyer, Ulysse, ma valise, commence à se remplir.